Définition : qu’est-ce que la tularémie ?
La tularémie est une maladie infectieuse, provoquée par la bactérie Francisella tularensis. Il s’agit d’une zoonose – transmise à l’homme par l’animal. Très contagieuse, elle est inscrite sur la liste des maladies à déclaration obligatoire (MDO) depuis 2002 dans le cadre du plan de prévention des risques nucléaires, radiologiques, biologiques et chimiques. Les contaminations naturelles sont en conséquence surveillées par les autorités sanitaires, afin de détecter les contaminations malveillantes. « Cette bactérie est capable d’infecter de nombreuses espèces animales parmi lesquelles, les lagomorphes (lièvres, lapins de garenne), les suidés (sangliers), les carnivores domestiques et sauvages, certaines espèces d’oiseaux, les rongeurs sauvages (mulots, campagnols, rats musqués, ragondins, etc.) ainsi que les animaux aquatiques comme les crustacés« , précise l’Anses. « Relativement fréquente aux Etats-Unis, dans les pays scandinaves, en Russie et au Japon, la tularémie est en augmentation dans le reste de l’Europe« , note l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes. En 2018, selon les derniers chiffres disponibles de Santé Publique France, 133 cas de tularémie ont été recensés. Et selon le Pr. Christian Chuard, chef du service d’infectiologie de l’hôpital de Fribourg, en Suisse, le nombre de cas de tularémie diagnostiqués en Suisse a été « multiplié par dix ces dix dernières années« . « Une partie des cas rapportés aux autorités de santé publique peuvent être dus à une meilleure détection des infections par les médecins, qui y pensent plus facilement, plutôt qu’à une augmentation vraie de l’incidence de la maladie dans la population« , note l’infectiologue.
Quel est le mode de transmission de la tularémie ?
« Actuellement les réservoirs principaux des bactéries sont les rongeurs, les lapins et les lièvres, les principaux vecteurs de la maladie sont les tiques, la porte d’entrée étant la morsure de la tique« , explique Christian Chuard. « On a aussi pu observer des transmissions directes de l’animal à l’homme, par le sang, lors de la découpe de gibier notamment« , poursuit-il. Autre mode de transmission : les contaminations par des particules aérosolisées. « On voit cela particulièrement en été chez les agriculteurs qui moissonnent leurs champs. Ils sont sans doute infectés par la présence d’animaux morts ou de déjection d’animaux contaminées« , ajoute l’infectiologue. « L’homme s’infecte au contact du réservoir animal (inoculation cutanée, ingestion, aérosols), par l’intermédiaire d’arthropodes vecteurs (morsures/piqûres de tiques, plus rarement de moustiques ou taons dans certaines régions) ou à partir de l’environnement (eau, sols humides) où la bactérie peut survivre plusieurs mois« , résume le Centre National de Référence des Francisella, en France.
Quelles sont les différentes formes de tularémie ?
Le Centre national de référence des Francisella distingue 6 formes de tularémie, qui donnent des signes cliniques différents en fonction du point d’entrée de la bactérie :
- les formes ulcéro-ganglionnaire et ganglionnaire : il s’agit de la la forme la plus fréquente, surtout en Europe, via une morsure de tique.
- la forme oculo-ganglionnaire
- la forme oro-pharyngée
- la forme pulmonaire
- la forme typhoïdique
Quels sont les symptômes de la tularémie ?
« Les symptômes de la tularémie peuvent apparaître entre 2 et 14 jours après la contamination, mais le plus souvent 3 à 5 jours après« , explique l’ARS Auvergne-Rhône-Alpes. « Pour la forme ganglionnaire, la plus fréquente, face à un état grippal (fatigue, fièvre, maux de tête…), le gonflement d’un ganglion (adénopathie) et une lésion cutanée au site de la morsure de tique, le médecin doit penser à la tularémie, surtout si c’est la saison des tiques, très actives en été, mais plus généralement de mars à octobre« , précise le Pr. Christian Chuard. Les autres symptômes spécifiques en fonction des formes de tularémie sont :
► Pour la forme oculo-ganglionnaire : une conjonctivite avec un ganglion agrandi devant l’oreille après une projection dans l’oeil
► Pour la forme oro-pharyngée : une pharyngite avec un ganglion gonflé dans la région du cou, parfois des signes digestifs, après une contamination par consommation d’eau ou d’aliments contaminés
► Pour la forme pulmonaire : une pleuro-pneumonie après une contamination par inhalation ou par le sang
► Pour la forme typhoïdique : il s’agit d’une forme généralisée de la maladie accompagnée d’une forte fièvre et d’un tuphos, un état d’obnubilation également rencontré dans le typhus ou la fièvre typhoïde, maladies auxquelles il a donné son nom, quelle que soit le point d’entrée de la bactérie
Comment pose-t-on le diagnostic d’une tularémie ?
On confirme la suspicion de tularémie de deux manières :
► Le test PCR : « il s’agit d’un prélèvement local (tissu ou sécrétion) qui nécessite une blessure ouverte ou une ponction du ganglion. Il s’agit du test le plus fiable« , commente notre expert.
► La sérologie : « on recherche alors les anticorps contre la bactérie. Toutefois, la sérologie n’est généralement positive, que deux à trois semaines après la contamination ».
Quelles sont les complications de la tularémie ?
Dans la forme ganglionnaire de la tularémie, on retrouve très peu de complications. « Toutefois, si on ne traite pas, le ganglion, s’il se trouve à proximité de la peau, peut s’ouvrir spontanément vers l’extérieur et se déverser de son pus. La guérison sera alors assez longue », explique Christian Chuard. Pour la forme pulmonaire, à l’origine d’une pneumonie, les symptômes peuvent être plus sévères chez une personne fragile. Pour la forme typhoïdique, la prise en charge est en outre beaucoup plus lourde. « Chez une personne immuno-déprimée, elle peut causer une septicémie très grave. Mais cette forme est vraiment rare », précise le médecin.
Quel est le risque de mortalité de la tularémie ?
Selon le manuel MSD, livre de médecine connu sous le nom de manuel Merck aux Etats-Unis et au Canada : « la mortalité est presque nulle dans les cas traités et est de près de 6 % dans les cas non traités de tularémie ulcéro-ganglionnaire. La mortalité est plus élevée dans la forme de l’infection de type 1 (la maladie rencontrée sur le continent américain) et dans la tularémie typhoïdique, septicémique et pulmonaire; elle peut aller jusqu’à 33 % dans les cas non traités. La mort est habituellement la conséquence d’une infection massive, d’une pneumonie, d’une méningite ou d’une péritonite. Les rechutes peuvent se produire dans des cas insuffisamment traités. Un accès confère une immunité« . A noter : cette forme très sévère de tularémie est due à une sous-espèce de la bactérie Francisella tularensis qui n’est pas présente en Europe. La sous-espèce, F. tularensis holarctica, active en Europe, est responsable de formes cliniques beaucoup moins graves.
Quel est le traitement pour soigner une tularémie ?
Les traitements spécifiques contre la tularémie sont les antibiotiques de la classe des quinolones et des macrolides. Le traitement dure en général deux à trois semaines. « Notez qu’on peut commencer à traiter le patient sans avoir pu confirmer le diagnostic, parce qu’il est trop tôt pour une sérologie ou parce que le test PCR était jugé trop invasif« , conclut le Pr. Chuard.
Merci au Pr. Christian Chuard, chef du service d’infectiologie de l’hôpital de Fribourg, en Suisse.
Source : JDF Santé