[Mise à jour le 12 décembre 2022 à 14h13] Pour la onzième année, la revue médicale Prescrire publie sa liste noire des médicaments à écarter pour se soigner. Dans l’édition 2023, 107 médicaments « plus dangereux qu’utiles » sont pointés du doigt dont 88 commercialisés en France car leur balance bénéfices-risques est défavorable dans toutes les situations cliniques dans lesquelles ils sont autorisés. « Ce bilan porte sur les médicaments dont l’analyse détaillée a été publiée dans Prescrire de 2010 à 2022. Il s’agit d‘analyses de nouvelles spécialités pharmaceutiques, de nouvelles indications, de suivis d’évaluation, tant sur les effets indésirables que sur les données d’efficacité, et parfois de réactualisations de données concernant certains effets indésirables d’un médicament », précise la revue. « Un des principaux objectifs de Prescrire est d’apporter aux soignants, et ainsi aux patients, des informations claires, synthétiques, fiables et actualisées, indépendantes des conflits d’intérêts commerciaux ou corporatistes, dont ils ont besoin pour leur pratique. » Suite à ce bilan, certains médicaments sont ajoutés, d’autres sont retirés, soit parce que leur commercialisation a été arrêtée sur décision de la firme ou d’une autorité de santé, soit le temps d’un réexamen de leur balance bénéfices-risques. La revue précise qu’il peut s’agir de :
- Médicaments actifs, mais qui, compte tenu de la situation clinique, exposent à des risques disproportionnés par rapport aux bénéfices qu’ils apportent
- Médicaments anciens dont l’utilisation est dépassée, car d’autres médicaments plus récents ont une balance bénéfices-risques plus favorable
- Médicaments récents, dont la balance bénéfices risques s’avère moins favorable que celle de médicaments plus anciens
- Médicaments dont l’efficacité n’est pas prouvée au-delà de celle d’un placebo, et qui exposent à des effets indésirables particulièrement graves.
Quels sont les médicaments à écarter ?
Dans l’édition 2023, ce sont 107 médicaments pointés dont 88 commercialisés en France pour lesquels Prescrire estime que la balance bénéfices-risques est défavorable dans toutes les situations cliniques dans lesquelles ils sont autorisés. La liste complète 2023 est disponible sur le site de la revue. Parmi ces médicaments, on trouve par exemple ;
- En cancérologie : le défibrotide (Defitelio®), le mifamurtide (Mepact® non commercialisé en France), le nintédanib (Vargatef® non commercialisé en France), le panobinostat (Farydak®), le roxadustat (Evrenzo® non commercialisé en France), la trabectédine (Yondelis® ou autre), le vandétanib (Caprelsa®), la vinflunine (Javlor®)
- En cardiologie : l’aliskirène (Rasilez® non commercialisé en France), le bézafibrate (Befizal®), le ciprofibrate (Lipanor® ou autre) et le fénofibrate (Lipanthyl® ou autre), la dronédarone (Multaq®), l’ivabradine (Procoralan®), le nicorandil (Ikorel® ou autre), l’olmésartan (Alteis®, Olmetec®), la ranolazine (Ranexa® – non commercialisé en France), la trimétazidine (Vastarel® ou autre).
- En dermatologie et allergologie : le finastéride 1 mg (Propecia® ou autre), la méquitazine (Primalan®)
- En diabétologie et nutrition : l’alogliptine (Vipidia®), la vildagliptine (Galvus®), la sitagliptine (Januvia®, Xelevia® ; et associée avec la metformine dans Janumet®, Velmetia®), l’orlistat (Xenical® ou autre).
- En rhumatologie/ Anti douleur : l’acéclofénac (Cartrex®), le diclofénac (Voltarène® ou autre) par voie orale, les coxibs : le célécoxib (Celebrex® ou autre), le kétoprofène en gel (Ketum® gel ou autre), le piroxicam (Feldène®), la glucosamine (Flexea®), le méthocarbamol (Lumirelax®), la capsaïcine en patchs (Qutenza®), la quinine (Hexaquine®)
- En gastro-entérologie : l’acide obéticholique (Ocaliva®), la diosmectite (Smecta® ou autre), la dompéridone (Motilium® ou autre), la métopimazine (Vogalène®, Vogalib®), la montmorillonite beidellitique alias monmectite (Bedelix®)
- En gynécologie-endocrinologie : la tibolone (Livial® ou autre), l’ulipristal à 5 mg (Esmya® non commercialisé en France)
- En neurologie : dans le traitement de la sclérose en plaques le natalizumab (Tysabri®), la flunarizine (Sibelium®) et l’oxétorone (Nocertone®), des neuroleptiques utilisés en prévention des crises de migraine.
- En cas de maux de gorge ou de toux : l’alpha-amylase (Maxilase® ou autre) expose à des troubles cutanés ou allergiques parfois graves ; l’oxomémazine (Toplexil® ou autre) , expose à « des effets indésirables disproportionnés » ; le tixocortol en pulvérisation buccale (un corticoïde associé avec la chlorhexidine (Rhinadvil maux de gorge®)) expose à des réactions allergiques de type angiœdèmes de la face, glossites, voire angiœdèmes de Quincke.
- En cas de rhume : les décongestionnants par voie orale ou nasale (l’éphédrine, la naphazoline, l’oxymétazoline, la phényléphrine, la pseudoéphédrine, le tuaminoheptane et la xylométazoline (non commercialisée en France)).
- Dépression, psychotrope : le citalopram (Seropram® ou autre) et l’escitalopram (Seroplex® ou autre) ; la duloxétine (Cymbalta® ou autre) ; l’étifoxine (Stresam®).
Quels changements par rapport à la liste Prescrire 2022 ?
► 3 médicaments de plus à écarter : Protéines d’arachide (Palforzia®) car il « augmente la fréquence des réactions allergiques dans la vie quotidienne des patients », Roxadustat (Evrenzo®) « une « soupe » de divers constituants du pavot (Papaver somniferum L.) autorisée dans les diarrhées sévères, n’apporte pas d’avantage clinique par rapport au lopéramide (Imodium° ou autre) » ,et Teinture d’opium (Dropizal®).
► Retour du nintédanib parmi les médicaments à écarter : ce médicament autorisé dans certains cancers bronchiques non à petites cellules (sous le nom de Vargatef®) et dans certaines affections pulmonaires chroniques (sous le nom de Ofev®), avait été retiré du bilan des médicaments à écarter en 2020, afin de réévaluer sa balance bénéfices-risques dans de nouvelles indications : certaines fibroses pulmonaires, et la pneumopathie interstitielle diffuse liée à une sclérodermie systémique. L’analyse des données d’évaluation clinique a montré que, dans ces situations aussi, la balance bénéfices-risques du nintédanib est défavorable. Il figure donc à nouveau parmi les médicaments à écarter.
►Deux médicaments retirés du bilan pour réévaluation : l’idébénone et le tériflunomide. L’idébénone (Raxone®) a été retirée du bilan des médicaments à écarter car Prescrire réévalue sa balance bénéfices-risques dans la neuropathie optique de Leber. Le tériflunomide (Aubagio®), un immunodépresseur autorisé dans la sclérose en plaques, a aussi été retiré du bilan car Prescrire évalue sa balance bénéfices-risques dans une extension d’indication chez les enfants à partir de l’âge de 10 ans.
Source : « Pour mieux soigner, des médicaments à écarter : bilan 2023 » Revue Prescrire 2022 (pdf, accès libre)
Source : JDF Santé