Qui doit respecter le secret médical ?

Quelle est la loi sur le secret médical en France ?

Le secret médical est régi en France par la loi « Kouchner » du 4 mars 2002 sur les droits des malades. Cette loi figure au Code de la santé publique. « Un des premiers droits des malades est celui du droit au secret, qui est mentionné à l’article L. 1110-4 du Code de la santé publique. Cet article a réuni un certain nombre de principes jusqu’alors éparpillés dans la jurisprudence« , explique Marc Dupont, adjoint à la Direction des affaires juridiques et des droits des patients. Cet article stipule que toute personne prise en charge par un professionnel de santé – et donc notamment par un médecin – , par un établissement ou service de santé, un professionnel concourant à la prévention et au soin, a droit au respect de sa vie privée et au respect des informations la concernant. « Le secret médical ne peut pas être opposé par le médecin à son patient, le médecin lui doit toute l’information. C’est par lui que dans l’exercice de la médecine sont protégées les confidences faites entre un médecin et un patient, il est indispensable pour créer la confiance au sein de cette relation« . Il s’agit d’une obligation déontologique pour les médecins.

Quelle différence avec le secret professionnel ? 

« L’obligation de secret en santé a longtemps été regardée comme celle du médecin, de même qu’il y a un secret de l’avocat, de l’assistante sociale… », note-t-il. Depuis la loi Kouchner, le secret médical s’impose à tous les professionnels de santé intervenant dans le système de santé : les infirmières, les manipulateurs radiologues, les aides-soignantes, les psychologues comme les médecins… mais également tous les membres du personnel des établissements de santé ou tout autre prestataire : le porteur de repas ou le bénévole qui visite les malades, par exemple. Les agents de la Sécurité sociale qui voient passer les dossiers médicaux sont également tenus au secret professionnel. « Le médecin ayant un rôle pivot dans le système de santé, c’est souvent lui qui est le destinataire des informations les plus confidentielles. La notion de secret « médical » a dans le langage courant une application assez large, qui recouvre celle du secret professionnel en santé« , précise Marc Dupont. Le secret médical n’est donc ni plus ni moins qu’une branche du secret professionnel. Il n’y a donc pas de différence entre eux.

Quelles informations sont couvertes par le secret médical ? 

Les informations couvertes par le secret médical sont non seulement les confidences du patient mais tout ce que le professionnel de santé a vu, entendu, compris lors de la consultation. « Selon l’article 4 du Code la santé publique, le secret couvre tout ce qui est venu à la connaissance du médecin dans l’exercice de sa profession. Le médecin ne peut donc pas divulguer dans son cercle familial ou hôpital qu’il a vu ou qu’il suit tel ou tel patient, une voisine, un proche…« , ajoute-t-il. Le devoir du médecin est donc de ne rien divulguer.

Quand le secret médical peut-il être levé ? 

Le secret médical est en principe absolu. Il existe pourtant des dérogations au secret médical prévues par la loi qui permettent de préserver l’ordre public, le bon fonctionnement de la société ou l’intérêt de la collectivité : par exemple, transmettre à l’autorité sanitaire des données relatives à certaines maladies transmissibles dont la liste est fixée par voie réglementaire, établir des certificats médicaux circonstanciés pour les soins psychiatriques sans consentement, déclarer des décès et/ou des naissances, établir des certificats pour les accidents du travail et les maladies professionnelles, détailler les lésions et leurs conséquences, transmettre à l’expert désigné par la commission de conciliation et d’indemnisation les documents que le médecin détient sur la personne s’estimant victime d’un dommage imputable à une activité de prévention, de diagnostic ou de soins (accidents médicaux, VIH, amiante…), communiquer lorsque le médecin exerce dans un établissement de santé au médecin responsable de l’information médicale, les données médicales nominatives nécessaires à l’évaluation de l’activité dans le cadre de la tarification. « Il y a eu un débat important à propos de ces exceptions au secret médical il y a 30 ans dans le cadre de l’épidémie de VIH qui était de savoir si le médecin pouvait ou devait faire connaître au compagnon du patient atteint du VIH la situation non révélée par ce dernier. L’Académie nationale de médecine penchait pour la possibilité d’une divulgation dans l’intérêt de la personne qui pourrait être contaminée. La question qui était posée : la non-assistance à personne en péril versus le secret médical. Elle a été tranchée par le Conseil national de l’Ordre des médecins et par Simone Veil, ministre de la Santé à l’époque, qui disait que le secret médical devait l’emporter sur toute considération, tout risque de contamination majeure, car à défaut serait rompue la confiance indispensable à la relation médecin-malade« , se souvient-il.

En cas de violation du secret médical, une amende de 15 000 euros et un an d’emprisonnement peut être décidée

Qu’est-ce que le secret médical partagé ?

Le secret médical partagé est une notion assez récente qui s’est développée en deux étapes. Une première étape, présente dans la loi Kouchner (2002), qui prévoit que lorsque le patient est soigné en milieu hospitalier au sein d’une équipe, le secret est « réputé partagé«  par l’ensemble de l’équipe. « Au sein de l’équipe, toutes les informations liées à la pathologie du patient seront partagées. Si un patient reçoit un patient cancéreux et qu’il lui parle de sa vie personnelle, ces informations ne seront pas partagées au sein du service, seule l’information médicale courante le sera », précise-t-il. La seconde étape en 2016 introduit dans la loi la notion « d’équipe de soins » : on considère alors que l’équipe de soins travaille ensemble pour la prise en charge d’un patient et dans ce cas le secret est partagé et confié à l’ensemble de l’équipe. « Aujourd’hui, la médecine est de plus en plus réalisée en pluri-établissements. Avec cette nouvelle notion, on prend en compte le fait que l’équipe de soins peut s’étendre au-delà de l’hôpital, dans plusieurs établissements. Dans ce cas, le secret médical pourra être partagé, mais seulement avec l’accord préalable du patient« , indique-t-il.

Le secret médical s’applique-t-il après le décès ?

Le secret médical continue de s’imposer après le décès : « la mort ne délivre pas le médecin du secret », selon la déontologie médicale. Ainsi pour « un patient qui meurt du VIH par exemple et qui n’a pas souhaité de son vivant que la cause de sa mort soit révélée. Celle-ci ne le sera pas. Cette situation n’est pas forcément simple« . Si la famille ou les héritiers demandent à accéder au dossier médical de la personne décédée, les informations relatives à la cause du décès pourront en principe leur être communiquées, mais sous réserve du souhait contraire du patient exprimé de son vivant.

Comment porter plainte en cas de violation du secret médical ? 

En cas de violation du secret médical, plusieurs voies sont possibles pour porter plainte. Une action pénale peut être engagée en portant plainte auprès du procureur de la République ou du commissariat. L’article 226-13 du Code pénal sanctionne la révélation d’une information à caractère secret. Une enquête aura lieu et conduira le cas échéant à une action devant le tribunal correctionnel.
Une plainte auprès du Conseil de l’Ordre des médecins peut être également effectuée à ce titre, et peut l’être en parallèle de la plainte pénale. La mise en cause du médecin peut être envisagée et peut lui faire encourir une sanction telle qu’un avertissement, un blâme ou autre, jusqu’à une interdiction d’exercer. « Ces deux voies de recours sont envisageables soit de manière indépendante, soit en parallèle. Une autre voie est encore possible mais plus compliquée : se plaindre auprès du directeur d’établissement dans lequel exerce le professionnel de santé en faute qui pourra en tant qu’employeur engager une disciplinaire« , précise-t-il.

Quelle amende en cas de violation du secret médical ?

En cas de violation du secret médical, une amende de 15 000 euros et un an d’emprisonnement peut être décidée à l’encontre du professionnel de santé.

Merci à Marc Dupont, adjoint à la Direction des affaires juridiques et des droits des patients, Assistance publique – hôpitaux de Paris (AP-HP).


Source : JDF Santé