Une péricardite est l’inflammation de l’enveloppe cardiaque. Elle est due généralement à une infection virale (virus du rhume, d’une angine, du Covid…). Même si elle n’est pas grave en soi, elle doit tout de même être prise au sérieux. C’est quoi une péricardite aiguë ? Chronique ? Avec ou sans épanchement ? Quels sont les symptômes d’une péricardite ? Ses causes ? Comment la diagnostique-t-on ? Comment en guérir ? Eclairage et interview du Dr Géraud Delesalle, cardiologue.
Qu’est-ce qu’une péricardite ?
Une péricardite correspond à l’inflammation du péricarde, l’enveloppe du coeur. « Le péricarde entoure le cœur. Il est composé de deux feuillets (un feuillet pariétal qui est extérieur et un feuillet viscéral qui est intérieur). Et au sein de l’espace péricardique, il y a du liquide lubrifiant qui enveloppe le cœur et qui lui permet de se contracter et de bouger sans qu’on le sente. En cas d’inflammation du péricarde, les feuillets ne peuvent plus glisser l’un contre l’autre sans frottement, ce qui peut entraîner des douleurs. C’est un peu comme si on frottait deux morceaux de cuir entre eux : ils accrochent« , décrit le Dr Delesalle. La péricardite provient le plus souvent d’un mécanisme inflammatoire, réactionnel à une infection virale. La péricardite peut être aiguë ou chronique, avec épanchement ou sèche.
C’est quoi une péricardite aiguë ?
Certains types de péricardites peuvent survenir d’un coup et durer peu de temps (quelques semaines) : on parle alors de péricardite aiguë.
C’est quoi une péricardite chronique ?
Une péricardite chronique dure plus de 3 mois. Généralement, elle résulte d’une tuberculose ou est consécutive à une radiothérapie (au niveau du sein gauche notamment lors d’un cancer du sein) ou à une chirurgie cardiaque « Pour opérer le cœur, on l’ouvre et il peut y avoir une réaction inflammatoire à distance de l’opération qui va devenir chronique et qui va entraîner une constriction du péricarde : l’enveloppe n’est plus très souple, devient rigide ou plus épaisse, ce qui va contraindre le cœur qui aura moins d’espace pour sa mobilité. Dans ce cas, on parle de péricardite chronique constrictive » explique le Dr Delesalle. Avant d’ajouter : « Dans le cas d’une péricardite chronique, l’inflammation dure plus longtemps que pour une péricardite aiguë, ce qui peut entraîner un remaniement fibreux du péricarde, dont des calcifications..
C’est quoi une péricardite avec épanchement ?
« Une péricardite peut provenir d’un épanchement, autrement dit, d’un liquide en excès dans la cavité péricardique« , répond notre cardiologue.
Schéma d’une péricardite avec épanchement
C’est quoi une péricardite sèche ?
On parle de péricardite sèche lorsqu’il n’y a pas de liquide en excès dans la cavité péricardique, en opposition à la péricardite avec épanchement. « Attention à ne pas poser le diagnostic de péricardite sèche à tort, car certains épanchements peuvent être invisibles à l’échographie cardiaque » tient à préciser notre interlocuteur.
C’est quoi une péricardite idiopathique ?
Une péricardite est dite idiopathique quand on ne connaît pas sa cause.
Quelles sont les causes d’une péricardite ?
Une péricardite peut être due à :
- Une infection virale (infection ORL bénigne : rhume, angine, laryngite, rarement Covid…).
- Une infection bactérienne.
- Une infection pulmonaire.
- Un cancer.
- Des rayons de radiothérapie.
- Une tuberculose (péricardite chronique).
- Des maladies auto-immunes (lupus érythémateux systémique (ou disséminé), (poly)arthrite rhumatoïde, fièvre rhumatismale …).
- Une insuffisance rénale.
- Un infarctus (forme tardive de péricardite).
- Une chirurgie cardiaque (péricardite sur une effusion de sang).
Quel virus peut provoquer une péricardite ?
Selon la Société européenne de cardiologie (ESC), voici les virus qui peuvent causer une péricardite :
- Entérovirus (coxsackie)
- Herpès (cytomégalovirus, virus Epstein-Barr, human herpes virus-6)
- Adénovirus
- Parvovirus B19
- Sars-CoV-2 (c’est rare)
Péricardite post Covid : combien de cas ?
« En effet, il y a eu quelques cas de péricardite post Covid« , mentionne notre cardiologue. Mais « dans la majorité des cas, l’état de santé des patients s’est amélioré de lui-même (la péricardite s’est résorbée d’elle-même) ou à l’aide d’un traitement », a rassuré l’Agence du médicament (ANSM), fin 2021. Depuis avril 2021, il s’agit aussi d’un effet secondaire pouvant survenir « rarement » après une injection de vaccin contre le Covid-19 à ARN (Comirnaty de Pfizer ou Spikevax de Moderna). Ces cas restent peu nombreux au regard du nombre personnes vaccinées en France : les données du Système National des Données de Santé rapportent 917 cas de péricardite (âge médian de 34 ans, 38% de femmes) entre le 15 mai et le 31 août 2021 chez les personnes âgées de 12 à 50 ans. Le risque est « plus élevé avec le vaccin de Moderna« selon l’ANSM. « Sur la période étudiée, aucun décès n’a été rapporté parmi les personnes hospitalisées pour une myocardite ou une péricardite suite à la vaccination » rassure l’Agence du médicament. En avril 2022, l’étude Epi-Phare a aussi conclu que « les cas de péricardite suivant la vaccination n’apparaissent pas plus graves que ceux survenant en dehors de la vaccination« .
Quels sont les symptômes d’une péricardite ?
Une péricardite peut être symptomatique ou asymptomatique (sans symptômes). « Généralement, une péricardite virale chez un sujet jeune entraîne une douleur dans la poitrine. Mais une péricardite peut également être détectée de manière fortuite suite à des examens réalisés dans le cadre d’un cancer ou d’une autre pathologie (cirrhose du foie, pathologie digestive…) sans que le patient n’observe une douleur particulière« , détaille le Dr Delesalle. Dans le cas d’une péricardite symptomatique, on peut observer une fièvre, des difficultés à respirer, des palpitations, un essoufflement, de la toux…
Comment reconnaître la douleur d’une péricardite ?
La douleur typique d’une péricardite est « une douleur à la poitrine, oppressante, du côté du cœur (mais pas toujours), augmentée en position allongée et lors de l’inspiration » décrit notre spécialiste.
Comment pose-t-on le diagnostic d’une péricardite ?
« Face à une suspicion de péricardite, la plus grande difficulté est d’affirmer le diagnostic afin de mettre en place un traitement adapté« , prévient notre interlocuteur. Pour cela, on se base sur plusieurs critères :
- Un faisceau d’arguments cliniques : le type de douleur ressentie, la présence de fièvre.
- L’écoute du cœur en auscultation à l’aide d’un stéthoscope (un bruit très particulier de frottement peut alerter le médecin).
- Des signes spécifiques à l’électrocardiogramme.
- L’aspect du cœur sur l’échographie cardiaque (épanchement péricardique…).
- Les résultats de la prise de sang (élévation des biomarqueurs d’inflammation).
- La preuve d’une inflammation péricardique par une technique d’imagerie (scanner, IRM).
- Les résultats d’une radiographie thoracique.
Quels traitements pour guérir une péricardite ?
Le traitement dépend du type et de l’origine de la péricardite :
► Face à une péricardite virale chez un sujet jeune et en bonne santé, le traitement consiste en la prescription d’anti-inflammatoires : l’aspirine (administrée pendant quelques semaines, schéma à posologie décroissante avec différents paliers) et la colchicine (administrée au long cours, pendant deux à trois mois afin de limiter le risque de récidive de péricardite). En plus des anti-inflammatoires, on peut aussi administrer des antidouleurs tel que le paracétamol. « S’il y a un épanchement, on refait un contrôle de l’échographie pendant le traitement anti-inflammatoire et après pour s’assurer que l’épanchement régresse. On fait un contrôle de la prise de sang pour vérifier que l’inflammation régresse et envisager d’arrêter les anti-inflammatoires« , détaille le cardiologue.
► Face à une péricardite tuberculeuse, il faut traiter la tuberculose.
► Face à une péricardite d’origine bactérienne, le traitement consistera en la prise d’antibiotiques
► Face à une péricardite avec épanchement, chez un patient pris en charge pour un cancer, ce sera éventuellement de la colchicine, de la chimiothérapie voire une ponction chirurgicale du péricarde.
Quelles sont les complications possibles d’une péricardite ?
Parmi les complications possibles d’une péricardite :
► La myocardite, une inflammation du muscle cardiaque associée à un risque d’arythmie cardiaque et d’arrêt cardiaque
► La récidive d’une péricardite (on parle d’une péricardite incessante ou intermittente). Dans ce cas, on peut être amené à faire des examens plus poussés, notamment des sérologies virales plus recherchées pour détecter le virus en cause, ainsi qu’une IRM cardiaque.
► La tamponnade cardiaque est la complication d’un épanchement péricardique. « Dans ce cas de figure, l’enveloppe cardiaque (donc le péricarde) se remplit de liquide de façon tellement importante que le liquide va comprimer le cœur, qui n’arrive plus à se remplir de sang à chaque cycle cardiaque, donc le cœur s’accélère, la tension baisse, il peut y avoir des œdèmes au niveau des jambes et cela peut conduire à l’arrêt cardiaque« , explique le Dr Delesalle.
Comment faire la différence entre une myocardite et une péricardite ?
« Une péricardite est une inflammation du péricarde qui entraîne une douleur, donc un symptôme qu’il convient de traiter, mais elle n’est pas grave en soi. En revanche, une myocardite est une inflammation du muscle cardiaque qui est associée à un risque d’arythmie cardiaque (trouble du rythme cardiaque) et donc d’arrêt cardiaque. Donc s’il y a une péricardite avec une myocardite, on va privilégier la prise en charge de la myocardite« , insiste le Dr Delesalle. La façon de les distinguer est de faire un dosage de la troponine qui est une enzyme cardiaque.
► Troponine élevée : signe d’une inflammation du muscle cardiaque, on s’oriente plutôt vers une myocardite.
► Troponine normale : signe d’une inflammation de la membrane cardiaque, on s’oriente plutôt vers une péricardite.
Une péricardite est-elle mortelle ?
« En général non, répond d’emblée notre interlocuteur. Néanmoins, c’est intéressant de poser un diagnostic assez vite pour mettre en place un traitement adapté. Il y a toutefois un premier problème : les symptômes cliniques et les signes à l’ECG sont variables et dépendent de la position des feuillets. De même, le frottement à l’auscultation peut être entendu à un moment T et ne plus être entendu 5 minutes après, ce qui complexifie le diagnostic. Faire le diagnostic d’une péricardite permet aussi et surtout d’éliminer par une prise de sang le diagnostic d’une myocardite associée, qui peut être mortelle »
Combien de temps d’arrêt pour une péricardite ?
Généralement une péricardite aiguë nécessite une période de convalescence et peut nécessiter un arrêt de travail allant de 2 à 4 semaines. Dans tous les cas, la reprise du travail doit être progressive.
Peut-on faire du sport après une péricardite ?
La péricardite contre-indique le sport pendant plusieurs semaines puisqu’elle nécessite du repos. La limitation de l’exercice physique doit être envisagée chez les non-athlètes jusqu’à la résolution des symptômes et la normalisation du bilan sanguin, de l’échographie cardiaque et de l’électrocardiogramme. L’arrêt de l’activité sportive chez les athlètes doit être d’au moins 3 mois après le début de la péricardite, recommande un consensus d’experts, dont les propos ont été rapportés par la Société européenne de cardiologie.
Merci au Dr Géraud Delesalle, cardiologue.
Sources : Agence du médicament / Haute Autorité de Santé / Recommandations de la Société européenne de cardiologie
Source : JDF Santé