Maladie de Hirschsprung : espérance de vie, c'est quoi ?

La maladie de Hirschsprung, aussi appelée le « mégacôlon », correspond à une forme de constipation sévère et est une des plus fréquentes maladies du tube digestif. Si elle se développe très tôt durant la grossesse, elle est le plus souvent diagnostiquée dès la naissance et peut être soignée. Découverte avec le Dr Caroline Chamond, chirurgienne pédiatre à l’hôpital privé de l’Estuaire, au Havre.  

Définition : qu’est-ce que la maladie de Hirschsprung ? 

À prendre très au sérieux, la maladie de Hirschsprung touche environ 1 naissance sur 5000. Aussi appelée le « mégacolon congénital », elle touche le rectum, parfois tout le côlon et peut s’étendre jusqu’à l’intestin grêle. Il s’agit d’un défaut d’innervation d’une partie du côlon. Normalement, celui-ci se contracte pour faire progresser les selles depuis le début du côlon jusqu’au rectum, « c’est comme un tube qui bouge comme un serpent », image le Dr Caroline Chamond, chirurgienne pédiatre au Havre. Cette contraction dépend des nerfs. Pendant le développement de l’embryon – entre la 5eme et la 8eme semaine – le colon se met en place puis les nerfs s’installent d’abord par la partie droite du côlon et progressent jusqu’au bas du rectum. De temps en temps, le mouvement s’arrête. La partie qui n’a pas de nerfs ne fonctionne donc pas

Quelle est l’espérance de vie ? 

Un enfant souffrant d’une forme classique de la maladie de Hirschsprung doit pouvoir, une fois opéré, vivre longtemps et normalement, assure le Dr Chamond. En revanche, si la totalité du colon est touchée, la vie peut être plus compliquée car il faut recréer un réservoir à partir des intestins. « L’enfant devra subir des opérations à plusieurs reprises, peut avoir du mal à s’alimenter comme les autres. Tous les traitements peuvent avoir un impact sur l’espérance de vie. » Enfin, si tout l’intestin est atteint par la maladie, l’enfant ne peut malheureusement pas vivre. 

Quels sont les symptômes de la maladie de Hirschsprung ? 

La partie de l’appareil qui ne fonctionne pas ne laisse alors rien passer : ni les gaz, ni les selles. Il faut alors imaginer un tube rigide et complètement bouché. « Tout ce qui va s’accumuler avant ne peut donc pas s’évacuer », précise le Dr Chamond. Cela élargi alors le colon bien que le problème provienne, dans la majorité des cas, du rectum. « Dans la majorité des cas, on s’en rend compte dans les 48 heures qui suivent la naissance car les nouveau-nés sont censés émettre le méconium (les premières selles) dans les premières 24 heures », explique le chirurgien pédiatre. « Lorsqu’il y a un retard du méconium, cela nous met la puce à l’oreille ». Parfois, la maladie de Hirschsprung peut passer quelques temps inaperçue. « Certains bébés peuvent avoir un peu de gaz et de selles au début lorsque seule une petite partie du rectum ne fonctionne pas. »

Schéma de la maladie de Hirschprung
Schéma de la maladie de Hirschprung © 123RF/JournaldesFemmes

Quelle est la cause de la maladie de Hirschprung ?  

Dans 20% des cas, il s’agit d’une anomalie génétique familiale

La maladie se produit au début du développement de l’embryon. Dans 20% des cas, il s’agit d’une anomalie génétique familiale. Mais dans 80% des cas, on assiste à une malformation nouvelle sans qu’il y ait eu d’antécédents dans la famille. « On ne comprend pas vraiment le pourquoi du comment. On arrive simplement à saisir le mécanisme et à identifier le gène responsable qui est, dans la majorité des cas, le gène RET que l’on retrouve dans les chromosomes non sexuels 3 et 19″, détaille Caroline Chamond.  

Quelle est l’évolution de la maladie de Hirschprung? 

Si la maladie n’est pas diagnostiquée, le ventre de l’enfant gonfle, ses veines ressortent, il mange peu voire plus. L’infection de l’intestin peut aussi passer dans le sang : c’est ce que l’on appelle une septicémie. L’intestin peut aussi se perforer à cause des gaz qui ne s’échappent pas, ce qui entraîne une péritonite. Il faut alors aller au bloc opératoire, nettoyer, laver, mettre l’enfant sous antibiotiques et le nourrir par les veines. « Si on ne fait rien du tout, l’enfant peut mourir. Les premières semaines sont celles durant lesquelles il faut être très vigilant », prévient la chirurgienne. 

Comment est diagnostiquée la maladie de Hirschprung ? 

Lorsqu’il y a des doutes à la naissance, les médecins procèdent à une biopsie : « il faut prélever un petit morceau des parois du rectum. On le fait soit par les voies naturels, sans anesthésie, grâce à une pince spécifique qui s’appelle la pince de Sheye, soit on effectue une biopsie chirurgicale : on endort l’enfant puis on analyse le prélèvement », explique la chirurgienne. Cette biopsie pourra confirmer ou infirmer la présence de la maladie. Dans un second temps, si la maladie de Hirschsprung est diagnostiquée, il est nécessaire de savoir sur quelle longueur elle s’étend. Pour cela, le Dr Chamond procède à un lavement : « On injecte un produit de contraste dans l’anus puis une imagerie standard fait une photo du colon qui met en avant la zone de transition entre la partie qui marche et celle qui ne fonctionne pas »Il est possible qu’un diagnostic soit établi tardivement. La chirurgienne a, par exemple, déjà eu le cas d’une petite fille de six ans qui n’avait pas été diagnostiquée avant. 

Quels sont les traitements ? 

Durant une urgence lorsqu’un enfant souffre d’une occlusion, il y a deux moyens de faire évacuer les gaz et les selles. Soit par un lavement que l’on nomme le « nursing » : une sonde est directement insérée dans l’anus sur 10 à 15 cm et permet aux excréments de s’échapper par la sonde. Le ventre dégonfle alors et les enfants parviennent mieux à s’alimenter. Si le nursing est efficace, les parents apprennent à le faire et les enfants peuvent rentrer à la maison. Si le nursing n’est pas efficace, une stomie (poche qui recueille les selles) est installée. Elle permet également de décompresser le ventre et les enfants peuvent rentrer à la maison et la garder pendant plusieurs mois. 

Quand envisager l’opération ? 

L’opération s’envisage le plus tôt possible, en fonction du poids de l’enfant. « Il est plus confortable d’opérer lorsque s’ils reprennent du poids. Si le nursing est efficace on peut attendre environ trois mois. » L’opération dépend aussi de la forme de la maladie. S’il est nécessaire d’enlever la totalité du côlon, on laisse la stomie plus longtemps. Le but de la chirurgie est d’enlever la partie sans nerfs et de faire se raccorder la zone saine au niveau de la marge anale. La chirurgienne pédiatre tient à préciser qu’après l’opération, le sphincter, dont le rôle consiste à fermer le rectum pour éviter les incontinences, n’est pas touché. Certains enfants pourraient avoir un peu de mal à être continents, rééduquant les muscles, grâce à des séances de kiné, les enfants doivent pouvoir être propres et vivre comme tout le monde. 

Merci au Dr Caroline Chamond, chirurgienne pédiatre à l’hôpital privé de l’Estuaire, au Havre.


Source : JDF Santé