L’épilepsie concerne 650 000 personnes en France dont 100 000 enfants. Parmi eux, Lucas, 15 ans, élève de 4ème au collège Toul Ar C’hoat, établissement spécialisé dans l’accueil et l’accompagnement des enfants épileptiques, basé à Châteaulin dans le Finistère (29). Lucas est atteint d’épilepsie depuis sa naissance « mais les crises ont commencé quand j’avais 3 ans« me raconte-t-il au début de notre entretien. Aujourd’hui, il en a une à deux par mois « plutôt au réveil ». « Parfois je les sens venir, tout mon corps tremble, parfois ce n’est qu’une partie, comme mes jambes, qui tremblent ». En revanche, « Lucas n’a pas d’absences » précise Gwen Garo, sa monitrice-éducatrice, assise à ses côtés. Les « absences » épileptiques correspondent à une perte de conscience très courte (quelques secondes) où le patient arrête son activité et la reprend là où il en était quand l’absence prend fin.
« Souvent les épileptiques passent pour des paresseux »
Lucas est arrivé à Toul Ar C’hoat en classe de 6ème, sur décision de ses parents. Il les retrouve tous les 15 jours quand il rentre chez lui dans l’Eure, en Normandie. Une séparation difficile mais « c’est une chance de venir à l’Internat » explique le jeune garçon. « On est beaucoup moins nombreux en cours que si j’étais dans un collège classique. Les cours sont plus faciles à suivre parce que les profs prennent le temps de nous expliquer. » Ces enseignants sont spécifiquement formés pour les accompagner : « Souvent les épileptiques passent pour des paresseux (dans les établissement classiques, ndlr) alors qu’ils ne le sont pas, défend Gwen Garo. Quand ils ont des absences, ils loupent pleins d’informations sans forcément ressentir ces absences ou leurs crises, c’est difficile pour eux. Ils ont aussi beaucoup de troubles dys associés. » A Toul Ar C’hoat, les enfants peuvent « se poser, souffler, reprendre les bases de l’enseignement puis reprendre leur scolarité dans un cycle classique, après le collège par exemple » poursuit-elle. Les enfants restent en moyenne 2 ans et demi dans l’institut. Ils sont entourés d’une équipe de professionnels : neurologue, neuropédiatres, éducateurs, orthophoniste, psychomotricienne, psychologue… « Ça me rassure d’être là, il n’y a pas le regard des autres » lance Lucas. Un regard pas toujours bienveillant sur une maladie associée à de nombreux préjugés.
« La plupart des jeunes ont subi du harcèlement »
« On a toujours le même cliché de la crise d’épilepsie qui fait peur alors que l’épilepsie ce n’est pas que la crise où on tombe par terre » argue-t-il. « Il faut que le regard change sur l’épilepsie, confirme Gwen Garo. J’ai commencé à travailler à Toul Ar C’hoat il y a une petite douzaine d’années, quand je disais que j’avais trouvé ce poste, on me disait « Oh avec les débiles ? ». L’épilepsie est une maladie qui est mal connue, une maladie dont on ne parle pas pourtant tout le monde connait quelqu’un qui en est touché. » Outre les regards, certains enfants atteints d’épilepsie subissent aussi du harcèlement. « Moi je n’ai pas eu d’ennuis à l’école (primaire, ndlr), je ne me suis pas fait harceler » m’informe spontanément Lucas. « En primaire, le harcèlement est plus rare. Mais la plupart des jeunes qui arrivent vers 13-14 ans ont subi du harcèlement à l’école, rebondit la monitrice-éducatrice. Ici, ils sont tous solidaires, si par exemple l’un d’eux fait une crise d’épilepsie. »
Reprendre confiance en soi, accepter le regard des autres, stabiliser sa maladie, se remettre à niveau sur le plan scolaire sont les enjeux moteurs de Toul Ar C’hoat. Pour Lucas, l’enjeu est « qu’un jour l’épilepsie soit plus connue pour donner la chance aux autres épileptiques d’être soignés et de pouvoir peut-être venir à Toul Ar C’hoat pour se sentir mieux. S’ils ont cette chance, il faut la prendre ».
Merci à Lucas et à Gwen Garo pour leurs témoignages recueillis le 6 février 2023. Institut Toul Ar C’Hoat : ITEP spécialisé épilepsie. Route de Toul Ar C’hoat. 29150 Châteaulin. 02 98 86 02 02.
Source : JDF Santé