Longtemps utilisée chez les bébés atteints de bronchiolite, la kinésithérapie respiratoire par désencombrement bronchique (comprenant des manoeuvres, ndlr) n’est plus systématique aujourd’hui, et même plus recommandée pour les moins d’1 an qui font leur premier épisode « mais la kinésithérapie respiratoire, ce ne sont pas seulement les techniques de désencombrement » expose d’emblée Pascale Mathieu, kinésithérapeute et Présidente du Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes. Quel est le rôle aujourd’hui du kinésithérapeute dans la prise en charge de la bronchiolite ? Pour quels bébés ? De quel âge ? Quelles sont les contre-indications ? Réponses avec Pascale Mathieu et le Dr Frédéric Le Guillou, pneumologue et Président de l’association Santé respiratoire France.
Quelles sont les indications de la kiné respiratoire en cas de bronchiolite ?
Les manoeuvres de kinésithérapie respiratoire pour désencombrer les bronches ne sont plus recommandées chez les enfants de moins d’un an qui ont un premier épisode de bronchiolite « mais la kiné respiratoire (hors manoeuvres, ndlr) est efficace pour assurer le confort de l’enfant, améliorer les signes et soulager les symptômes notamment par le mouchage du nez et le suivi de l’évolution de l’état de l’enfant » précise Pascale Mathieu. La HAS recommande de proposer « la kinésithérapie respiratoire qu’aux enfants qui souffrent par exemple d’une pathologie respiratoire chronique ou d’une maladie neuromusculaire« . « La kiné respiratoire peut être efficace pour la prise en charge de la bronchiolite si elle est liée à d’autres pathologies respiratoires que l’infection virale classique pour drainer les sécrétions. Elle peut soulager l’enfant » confirme le Dr Frédéric Le Guillou. « En effet, à partir de plusieurs épisodes de bronchiolites on peut rapprocher la prise en charge à celle de l’asthme et la kiné respiratoire peut être utile pour soulager l’enfant en l’aidant à drainer les sécrétions » ajoute-t-il.
Pourquoi la kiné respiratoire n’est plus recommandée par la HAS ?
En raison d’un manque de preuves dans la littérature scientifique, la Haute Autorité de Santé (HAS) a décidé en novembre 2019 de ne plus recommander la kinésithérapie respiratoire visant à désencombrer les bronches chez l’enfant de moins de 12 mois lors du premier épisode de bronchiolite. « L’augmentation du flux expiratoire n’est pas efficace dans la prise en charge des nourrissons hospitalisés pour une bronchiolite aiguë. N’ayant pas fait la preuve de son efficacité pour les formes de bronchiolites traitées en ambulatoire non plus, elle n’est donc pas recommandée » a expliqué l’autorité. « Il faut lever l’ambiguïté. Il ne s’agit pas d’une contre-indication mais seulement d’une recommandation qui ne concerne pas tous les enfants » souligne Pascale Mathieu qui précise que « la kinésithérapie respiratoire, ce ne sont pas seulement les techniques de désencombrement ». Plusieurs syndicats de kinésithérapeutes avaient réagi à la publication de la HAS dans un communiqué, rappelant qu’ « à aucun moment la HAS ne dit qu’il ne faut pas consulter de kinésithérapeute en cas de bronchiolite ».
Quel est le rôle du kinésithérapeute en cas de bronchiolite ?
« Les parents peuvent consulter un kinésithérapeute qui pourra expliquer comment fractionner les apports alimentaires et comment aider leur enfant à mieux respirer grâce aux techniques de désobstruction des voies aériennes supérieures (mouchage du nez), sans aspirations nasopharyngées » répond la kinésithérapeute. Cette désobstruction doit être systématique et faite plusieurs fois par jour. Chez l’adulte « on travaille également sur les volumes en faisant expirer puis inspirer fortement le patient pour garder du volume à l’intérieur des poumons en travaillant le diaphragme et les muscles de la respiration« .
Qui consulter si bébé est très encombré ?
« Il faut consulter en premier lieu le médecin généraliste en cas de bronchiolite, insister sur le nettoyage de nez du bébé, aérer la chambre, fractionner l’alimentation s’il a des difficultés à manger » recommande le Dr Frédéric Le Guillou, pneumologue. « Le kinésithérapeute pourra également orienter les parents vers les Urgences si besoin. Le suivi par un kiné permet d’éviter de nombreux passages aux Urgences inutiles et le risque de saturation des services de santé surtout en période hivernale » rappelle la kinésithérapeute.
Comment se déroule une consultation chez le kiné pour bronchiolite ?
« En cas de bronchiolite, le kiné reçoit les parents et l’enfant, interroge sur l’alimentation, le sommeil, le vomi, la toux, la présence ou non de diarrhée, ou encore l’essoufflement du bébé » explique la kinésithérapeute. « Ensuite il déshabille l’enfant et l’examine : il regarde la fréquence respiratoire et cardiaque, écoute si il y a du sifflement, si le nez est encombré, si le ventre se creuse quand le bébé respire, si il est en détresse respiratoire » poursuit notre interlocutrice. Tous les signes permettent ensuite de savoir quelle est la conduite à tenir. Si la prise en charge à l’hôpital n’est pas utile, « on procède au mouchage qui est essentiel et que souvent les parents n’osent pas effectuer. On peut également avoir recours aux techniques de kinésithérapie de désencombrement dans les cas où le bébé en a besoin (plus d’un an, épisodes répétés de bronchiolite, ndlr) » ajoute notre interlocutrice.
A partir de quel âge la kiné respiratoire peut-elle être pratiquée ?
Les manoeuvres de kiné respiratoire visant à désencombrer les bronches d’un enfant ne peuvent pas être pratiquées avant l’âge d’un an, sauf si l’enfant souffre d’une pathologie respiratoire chronique, d’une maladie neuromusculaire…
Combien de temps dure la kiné respiratoire en cas de bronchiolite ?
On consulte le temps nécessaire. « Parfois, 3 visites chez le kiné suffisent. Si les signes persistent, on pourra voir le bébé pendant une semaine. Il n’y a pas de durée prédéfinie » répond la kinésithérapeute.
Quelles sont les indications de la kiné respiratoire chez l’adulte ?
Chez l’adulte, la kiné respiratoire est indiquée en cas de maladies respiratoires (BPCO par exemple), bronchite, mucoviscidose, suites de chirurgies thoraciques (cancers du poumons, pleurésie) ou d’opération au niveau cardiaque entraînant des difficultés de mobilité de la cage thoracique et pour les pathologies pulmonaires. « La kiné respiratoire permettra de drainer les sécrétions bronchiques pour éviter la surinfection » précise le pneumologue.
Quelles sont les contre-indications de la kiné respiratoire ?
Les pathologies liées à une fragilité osseuse, telle que la maladie des os de verre, sont des contre-indications à la kiné respiratoire. « L’insuffisance cardiaque est aussi une contre-indication à la kiné respiratoire. Et il faut faire attention à ne pas traumatiser l’enfant. Certaines pratiques peuvent être vécues comme violentes, parfois. On ne devrait pas en faire pour les bébés de moins d’un an lors d’un premier épisode de bronchiolite » indique Frédéric Le Guillou en accord avec les recommandations de la HAS de 2019.
La kiné respiratoire est-elle prise en charge en cas de bronchiolite ?
La kiné respiratoire est remboursée en cas de bronchiolite chez le bébé sur prescription médicale.
Merci à Pascale Mathieu, kinésithérapeute et Présidente du Conseil national de l’ordre des masseurs-kinésithérapeutes et au Dr Frédéric Le Guillou, pneumologue et Président de l’Association Santé respiratoire France.
Source : JDF Santé