Digital Detox : définition, bienfaits, comment faire ?

[Mis à jour le 6 février 2023 à 15h40] Fini l’hyperconnexion ! La Journée sans téléphone portable (ou smartphone) est l’occasion de s’éloigner des écrans pendant un certain temps. Loin d’être un challenge facile, la digital detox ou la désintoxication numérique consiste à se défaire des écrans pendant un temps donné. 1 jour, 1 semaine, 1 mois ou plus. C’est d’ailleurs le défi que se sont lancées Léa et Manon, deux cousines et colocataires accros aux réseaux sociaux et à Internet, dans la série française Détox (« Off the Hook » pour le titre anglophone), diffusée sur la plateforme Netflix.

Si la tendance de la digital detox est de plus en plus populaire, c’est que le numérique prend de plus en plus de place dans la vie des Français qui passent en moyenne 4h22 par jour devant des écrans (hors travail), selon un sondage mené par BVA Group, experts du comportement. Près de deux tiers des Français avouent être aujourd’hui dépendants de leurs outils connectés, et un tiers totalement dépendants, à l’origine d’un sentiment de manque. Pour autant, ces appareils ne sont pas à diaboliser, mais plutôt à utiliser de manière plus responsable et bienveillante. Alors, à l’heure où les smartphones, tablettes, télés, ordinateurs et montres connectées sont omniprésents dans notre quotidien, comment faire une digital detox ? Et que gagne-t-on à les lâcher pendant une période ? Tour des bienfaits et conseils avec Dana Castro, psychologue et psychothérapeute.

C’est quoi une digital detox ?

On l’appelle « digital détox » en anglais ou désintoxication numérique en français. Le terme est entré pour la première fois dans le dictionnaire d’Oxford en 2014, mais il est de plus en plus utilisé, y compris en France. La digital detox correspond à un sevrage du numérique. Elle consiste à faire une pause dans son utilisation des écrans, de son téléphone, de sa tablette ou de son ordinateur. En clair, pendant une période définie, on s’abstient d’utiliser son smartphone, d’allumer la télévision ou encore de jouer sur son ordinateur.

Quelles sont les bienfaits d’une digital detox ?

« La connexion au numérique est simple, facile, attirante et surtout occupationnelle. Elle devient vite une habitude qui vient combler un vide. Les écrans, et particulièrement le téléphone, est une espèce de consommable : on zappe, on passe d’un réseau social à une news, d’une photo de mode à une vidéo divertissante… Notre cerveau va dans toutes les directions et il a très peu de moment pour se poser et réfléchir de façon constructive. Il n’est pas dans un voyage sensoriel qui pourrait le nourrir, mais plutôt dans une forme d’errance sans grande finalité. Au final, la surconsommation du numérique entraîne une fatigue (visuelle certes, mais surtout mentale et émotionnelle) doublée d’une forme d’ennui. Il est donc intéressant de se détoxifier de temps en temps« , explique notre interlocutrice. Dans le détail, faire une digital détox permet de :

► Se retrouver avec soi-même et nourrir son discours intérieur. « Les outils numériques sont tournés vers l’extérieur et inhibent l’intériorité. Ils ne nous apportent pas beaucoup de réponses sur nous-mêmes. En stoppant de temps en temps son lien au numérique, on se reconnecte à soi-même, on s’écoute davantage et on se questionne sur ses ressentis, ses émotions, ses besoins, ses limites…« , liste notre spécialiste.

► Relativiser et arrêter d’être dans une course frénétique de comparaison. « La digital detox est très importante pour l’estime et pour avoir une vision réaliste de soi-même, indique-t-elle. Le virtuel, et particulièrement les réseaux sociaux favorisent la comparaison malveillante, et sont culpabilisateurs. Par exemple, la jeune maman ne se sent pas à la hauteur quand sur Instagram elle voit d’autres mamans mieux gérer leur vie de famille. Les gens ont tendance à se comparer à des espèces d’idéaux autodéclarés, mais comment peut-on se comparer à quelque chose de virtuel ?« 

► Reposer la psyché, gagner en sérénité en étant dans l’ici et maintenant « La digital détox permet de s’éloigner du stress, engendré par la surconsommation du numérique et l’hyperconnexion aux réseaux sociaux et au flux continu d’informations, souvent anxiogènes, avec la « peur de rater quelque chose ». »   

► Être en meilleure santé. La digital détox permet d’être moins sédentaire (on a de fait plus de temps pour aller se promener, faire du sport), limiter les problèmes de vue (les écrans favorisent la fatigue visuelle, facteur de risque d’une baisse de la vue), avoir un sommeil de meilleure qualité (l’écran émet de la lumière bleue qui inhibe la sécrétion de mélatonine, l’hormone qui régule les cycles veille/sommeil). 

► Gagner en concentration : les notifications détournent l’attention et distrait en permanence. Elles empêchent de se concentrer sur les interactions sociales dans un monde « physique » et non virtuel. Par ailleurs, les écrans peuvent faire perdre la notion du temps. 

Comment faire une digital détox ?

« Comme pour arrêter de fumer, chacun à sa méthode. Et puis l’idée n’est pas de complètement arrêter les écrans, mais d’en avoir une consommation plus responsable et surtout, plus bienveillante« , tient à rappeler Dana Castro.

Commencer progressivement, sur une petite période. Une heure, puis 2, puis une demi-journée, une journée ou des plages-horaires (par exemple, de 20h à 7h)… Un sevrage trop long et trop brutal est contre-productif. L’idée est de se mettre en mode avion (ou d’éteindre son téléphone, mais le mode avion rassure car il permet d’avoir son téléphone allumé ainsi que l’accès à l’heure) pendant un moment dans la journée et d’augmenter progressivement la durée. 

Laisser son téléphone hors de la chambre, pour ne pas être tenté de l’allumer dès le réveil ou de scroller sur les réseaux juste avant de dormir. Il suffit de laisser son téléphone éteint dans le salon par exemple et de ressortir son bon vieux réveille-matin. 

Combattre l’ennui et profiter de ce temps exempt d’écran pour lire ou s’adonner à d’autres activités (cuisine, loisirs créatifs, jardinage, création, expo…) « On a tendance à se perdre dans les écrans et à perdre son temps. On se sert donc de ce temps retrouvé pour faire tout ce qu’on pense ne pas avoir le temps de faire« , conseille notre interlocutrice. 

Se faire aider par des applis (voir la liste plus bas) qui permettent de bloquer certains accès voire de verrouiller le téléphone totalement. Pour être le plus tranquille possible, il vaut mieux prévenir ses contacts les plus fréquents histoire qu’ils ne s’inquiètent pas. Il est également possible de bloquer toutes les notifications pour décider consciemment quelles applications on souhaite ouvrir. 

Se questionner sur ses (réels) besoins. Aller sur son téléphone est bien souvent compulsif. La plupart du temps, il s’agit plus d’un réflexe que d’un réel besoin de le consulter. Et souvent, checker son téléphone permet de se donner une constance, quand on attend son train, qu’un ami s’absente au restaurant, quand on est à la pause déj’ avec des collègues, au début d’une soirée à laquelle on ne connaît pas grand monde. Ainsi, à chaque fois que vous touchez votre téléphone, demandez-vous si vous avez réellement besoin de le consulter (est-ce pour appeler quelqu’un ou simplement pour passer le temps ?) et ce que vous auriez pu faire à la place si vous ne l’aviez pas consulté.

Se lancer un challenge de temps d’écran, à ne pas dépasser (le temps d’écran est consultable dans les paramètres du téléphone ou de la tablette) et s’entraider avec ses proches, ses amis, sa famille, son conjoint pour tendre à une consommation des écrans plus responsable. 

Profiter des vacances pour se déconnecter. Le numérique nous fait perdre une chance de vivre autre chose, de nous recentrer sur nous-même, de se reconstruire et de revenir plus en forme au travail. Chacun doit se poser la question de quel média il a besoin de se déconnecter pour pouvoir profiter (réellement) des vacances. 

4 applications pour faciliter la digital detox

  • Flipd qui permet de bloquer toutes les applications comme Facebook, Snapchat… mais qui permet de continuer à envoyer des SMS en cas d’urgence.
  • Calldoor qui permet aux managers de bloquer les applications, SMS, e-mails, appels… des téléphones portables professionnels de leurs équipes, et ce pendant la durée de leur choix. 
  • Digital Détox qui propose un accès limité à son téléphone pendant le défi (certaines applis sont inaccessibles et bloquées)
  • Forest qui propose de définir une durée durant laquelle vous devez vous déconnecter (1 à 12 heures). Pendant cette période, une petite graine s’affiche sur votre écran d’accueil et pousse jusqu’à devenir un arbre qui dessèche et disparaît si vous touchez à votre téléphone.

Comment savoir si on a besoin d’une digital detox ?

On ressent de la fatigue, une lassitude, une saturation ou un profond ennui qui sonne souvent comme un déclic, le déclic qu’il faut se déconnecter

« En pratique, presque tout le monde aurait besoin, dans l’absolu, de se détoxifier et de faire une digital detox, indique notre experte. Certaines personnes plus que d’autres bien entendu. Ce n’est pas possible de ne pas se rendre compte à un moment donné que sa consommation numérique est problématique. On ressent de la fatigue, une lassitude, une saturation ou un profond ennui qui sonne souvent comme un déclic, le déclic qu’il faut se déconnecter. Les spécialistes décrivent même une pathologie qui s’appelle la nomophobie (la peur de se retrouver sans son téléphone)« . En théorie, il existe des tests pour savoir si on est accro à son téléphone. Ils n’ont pas de valeur diagnostique mais ils permettent de s’auto-situer sur l’échelle de la consommation digitale. Par exemple, il y en a un qui a été élaboré par le Dr David Greenfield, Fondateur du Center for Internet and Technology Addiction. Il s’agit d’une série de 12 questions auxquelles il faut répondre par oui par non. Chaque oui correspond à 1 point. On estime qu’à partir de 4 points ou plus, il est probable que la personne ait un schéma d’utilisation problématique ou compulsif. Parmi les questions : 

  • Dormez-vous régulièrement avec votre smartphone allumé sous votre oreiller ou à côté de votre lit ?
  • Vous arrive-t-il de regarder et de répondre à des SMS, des tweets et des e-mails à toute heure du jour et de la nuit, même si cela signifie interrompre d’autres choses que vous faites ?
  • Vous sentez-vous mal à l’aise lorsque vous laissez accidentellement votre téléphone ou un autre appareil numérique dans la voiture ou à la maison, que vous n’avez pas de réseau ou qu’il est en panne ?
  • Lorsque vous mangez, votre smartphone fait-il toujours partie de la mise en place de la table ?
  • Vous arrive-t-il de passer régulièrement du temps sans réfléchir en regardant fixement votre smartphone, votre tablette ou votre ordinateur, même s’il y a peut-être des choses meilleures ou plus productives à faire ?

Merci à Dana Castro, psychologue et psychothérapeute.


Source : JDF Santé