Cancer de la thyroïde : traitement, âge, quelle survie ?

Le cancer de la thyroïde est de bon pronostic. Les nodules sont bénins dans 95 % des cas : ce ne sont pas des cancers, il s’agit d’hyperplasies, d’adénomes ou de kystes. Le cancer de la thyroïde est le plus souvent découvert par la présence d’un nodule découvert par hasard lors d’un examen d’imagerie (échographie du cou) ou d’une palpation du cou. Selon les données de l’Institut national du Cancer (Inca), on estime à environ 10 500 le nombre de nouveaux cas de cancers de la thyroïde par an en France. Les femmes représentent 2/3 des nouveaux cas. Qu’est-ce qui provoque un cancer de la thyroïde ? Quels sont les signes ? Comment le diagnostique-t-on ? Quand opère-t-on ?

Qu’appelle-t-on un cancer de la thyroïde ?

Le cancer de la thyroïde est un cancer qui atteint la glande thyroïde. Il y a deux familles principales : 

►  Les cancers de la thyroïde de souche folliculaire qui sont les plus fréquents (ils représentent 90 à 95% des cancers thyroïdiens). « Parmi les cancers de souche follicule, le plus fréquent est le cancer papillaire de la thyroïde qui représente 80% des cas de cancers de souche folliculaire« , indique le Dr Livia Lamartina, oncologue spécialisée en médecine nucléaire à Gustave Roussy.

► Les cancers médullaires de la thyroïde qui se développent aux dépens des cellules C de la thyroïde et qui sont beaucoup plus rares (ils représentent environ 5% des cancers de la thyroïde). « Un quart des cancers médullaires de la thyroïde sont d’origine héréditaire, ce qui nécessite de faire un dépistage familial » poursuit notre interlocutrice.

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Schéma d’un cancer de la thyroïde © joshya – stock.adobe.com/Journal des Femmes

Quels sont les symptômes d’un cancer de la thyroïde ?

Le cancer de la thyroïde n’est généralement pas agressif et entraîne peu de signes évocateurs. Voilà pourquoi, la plupart du temps, ce cancer est découvert fortuitement, à l’occasion d’un dépistage échographique pour une autre raison (échographie doppler pour contrôler les vaisseaux du cou en général), lors duquel on peut retrouver un nodule thyroïdien. Les principaux symptômes (rares) sont :

► La présence d’un nodule (petite boule) au niveau du cou

La modification de la voix (voix rauque ou « cassée« ) ou la perte de la voix, consécutive à la présence du nodule. 

► Un mal de gorge qui persiste (toutefois peu spécifique au cancer de la thyroïde).

► Parfois, le développement d’un goitre

​​​​​​​Quel est l’âge moyen au diagnostic ?

« L’âge moyen au diagnostic est autour de la cinquantaine, répond le Dr Lamartina. La fréquence de ce cancer augmente avec l’âge, tout comme l’apparition de nodules de la thyroïde« . 

Quels sont les causes ou facteurs de risque d’un cancer de la thyroïde ?

Un facteur de risque peut favoriser le développement d’un cancer, mais la présence d’un ou plusieurs facteurs de risque n’entraîne pas systématiquement l’apparition d’un cancer. Inversement, un cancer peut se développer sans que la personne n’ait de facteurs de risques. Pour les cancers de la thyroïde, deux principaux facteurs de risque sont identifiés :

Une exposition aux radiations, pendant l’enfance, « notamment observée chez des enfants qui ont fait de la radiothérapie externe. Ces enfants doivent rentrer dans des programmes de dépistage car ils ont un risque augmenté de développer des cancers thyroïdiens« , explique notre interlocutrice. Chez l’adulte, l’exposition aux radiations ne représente pas un facteur de risque car la thyroïde (qui n’est plus en développement comme chez l’enfant) n’est plus radiosensible. 

► Un contexte familial et/ou génétique, avec l’altération du gène RET identifiée comme favorisant le développement d’un cancer médullaire de la thyroïde. « Il y a plusieurs types d’altération du gène RET et selon le type d’altération, on peut prévoir le risque (qui peut aller de 0 à 50% de risque) et ainsi, orienter le type de surveillance. A chaque fois qu’une personne est diagnostiquée d’un cancer médullaire de la thyroïde, on peut dépister tous ses apparentés à l’aide d’un test génétique (qui se fait sur un échantillon de sang), ce qui permet de définir le risque et le type de surveillance à mettre en place« , détaille le Dr Lamartina. 

​​​​​​​Quel pronostic de survie d’un cancer de la thyroïde ?

Le cancer de la thyroïde est un cancer de bon pronostic. Les décès liés aux cancers thyroïdiens sont très rares et concernent des personnes réfractaires aux traitements. « Dans la très grande majorité des cas, le cancer de la thyroïde se guérit très bien grâce à la chirurgie, avec un taux de survie à 5 ans estimé à 98% pour les hommes comme pour les femmes« , rassure l’oncologue. Plus la personne est jeune au moment du diagnostic, plus le pronostic est bon. 

Comment diagnostique-t-on un cancer de la thyroïde ?

Le cancer thyroïdien se présente sous la forme d’un nodule qui peut être détecté lors d’une palpation du cou ou découvert, très souvent, de façon fortuite lors d’un examen d’imagerie réalisé pour une autre raison (échographie pour contrôler les vaisseaux du cou par exemple). 

► La première base pour évaluer un nodule de la thyroïde est l’échographie cervicale ou thyroïdienne : un examen non invasif qui permet d’estimer la taille du nodule et ses caractéristiques (s’il est liquide, solide ou mixte). Cela permet de définir le degré de suspicion d’un nodule, sachant que la plupart des nodules thyroïdiens sont jugés « non suspects ». 

► Selon le degré de « suspect », on réalise une cytoponction du nodule (échantillon du nodule avec une fine aiguille pour l’analyser au microscope) qui permet de préciser si les cellules sont plutôt rassurantes (normales) ou suspectes d’un cancer thyroïdien (ou parfois entre les deux, ce qui nécessite un deuxième contrôle). Pour les petits nodules qui ne sont pas suspects, il n’y a même pas besoin de faire une cytoponction. 

► A ce jour, pour éviter le surdiagnostic massif, « le dépistage du cancer de la thyroïde ne doit pas être systématique« , tient à rappeler notre interlocutrice. En effet, le diagnostic d’une tumeur indétectable à la palpation et qui n’aurait pas évolué vers la maladie, occasionne des traitements lourds (ablation de la thyroïde avec prise de lévothyroxine à vie…), avec un risque de complications, nettement supérieur au risque que le nodule évolue vers la maladie ou le décès

Quels sont les traitements d’un cancer de la thyroïde ?

► Pour les très petits cancers (moins d’un cm) : La chirurgie n’est pas systématique. « Si le nodule fait moins d’1 centimètre, il n’est pas forcément nécessaire de l’enlever. On propose alors au patient une surveillance active avec des échographies régulières. Si le nodule n’évolue pas, on considère qu’il y a moins de risque de « simplement » le surveiller rigoureusement plutôt que d’opérer. Bien entendu, il faut que le patient soit d’accord avec cette approche et qu’il s’engage à faire son suivi« , détaille le Dr Lamartina. 

► Quand le nodule fait plus d’1 centimètre : « il vaut mieux opérer. La chirurgie est le traitement de référence. L’ablation de la thyroïde peut être partielle et ne concerner que la moitié de la thyroïde affectée par le cancer (on parle de lobectomie thyroïdienne) ou totale si la tumeur fait plus de 2 cm (on parle de thyroïdectomie totale). « Quand on fait une lobectomie, il y a environ 50% de chances d’avoir toujours une sécrétion d’hormones thyroïdiennes. En revanche, en cas d’ablation totale de la thyroïde, le patient a besoin de prendre un traitement substitutif de façon quotidienne à vie pour compenser l’absence de sécrétions d’hormones thyroïdiennes« , poursuit la spécialiste. Selon l’atteinte ganglionnaire, il faut parfois retirer les ganglions autour de la thyroïde« , explique l’oncologue. Selon les caractéristiques de la tumeur et le risque, il faudra parfois administrer un traitement complémentaire à base d’iode radioactif pour détruire les reliquats thyroïdiens. Ce traitement est réservé aux patients à risque intermédiaire à élevé de rechute. Ce n’est donc pas un traitement systématique. Selon le risque, on adapte le traitement. « Les patients atteints d’un cancer de la thyroïde à faible risque de rechute ne devraient plus recevoir un traitement à base d’iode radioactif après chirurgie thyroïdienne, a demontré une étude menée par des médecins-chercheurs de Gustave Roussy et du réseau national français TUTHYREF et publiée dans the New England Journal of Medicine du 10 mars 2022« , rapporte notre interlocutrice. 

​​​​​​Où peut-il faire des métastases ?

On parle de métastases quand des cellules cancéreuses peuvent se détacher de la tumeur initiale et emprunter les vaisseaux lymphatiques ou sanguins pour aller envahir d’autres parties du corps. Les cancers de la thyroïde de souche folliculaire donnent rarement des métastases (10% des cas). Pour les cancers médullaires, le risque métastasique est un peu plus fréquent (autour de 30% des cas). Le cancer de la thyroïde peut métastaser dans :

  • Les ganglions lymphatiques situés dans le cou. On parle alors de métastases ganglionnaires ou d’envahissement ganglionnaire. 
  • D’autres organes, notamment les poumons ou les os. On parle de métastases à distance.

« Il existe des biomarqueurs relativement fiables qui facilitent le suivi dans le cas d’un cancer de la thyroïde. Pour les cancers médullaires de la thyroïde, on peut doser la calcitonine. Un taux normal de calcitonine indique qu’il n’y a pas de tumeurs restantes. Un taux élevé de calcitonine nécessite des examens d’imagerie pour rechercher la cause. Pour les cancers de souche folliculaire, le dosage de la thyroglobuline permet de vérifier qu’il n’y a pas d’atteintes ganglionnaires ou dans d’autres organes. Aussi, quand on administre un traitement à base d’iode radioactif, on en profite pour faire une scintigraphie. Cet examen permet de déterminer si le cancer s’est propagé à l’extérieur de la thyroïde », conclut le Dr Lamartina. 

Merci au Dr Livia Lamartina, oncologue spécialisée en médecine nucléaire à Gustave Roussy.

Sources :

– Cancers de la thyroïde : les points clés, Institut national du Cancer / 

– New England Journal of Medicine : Pas de bénéfice de l’iode radioactif dans le cancer de la thyroïde à faible risque, Gustave Roussy, 22 mars 2022


Source : JDF Santé