Qu’est-ce que l’apathie ?
« L’apathie désigne une difficulté à se mobiliser pour des activités, causée par un manque d’intérêt émotionnel, et non d’une cause physique« , explique Dina Karoubi-Pecon, psychanalyste et psychothérapeute. Concrètement, les patients sont indifférents à tout, aux émotions et aux désirs, et n’ont envie de rien. Ils ne ressentent donc plus d’intérêt à bouger, se mobiliser, et se sentent généralement très fatigués. « La personne est comme gelée. Cela se fait, bien sûr, contre sa volonté. Ce manque d’intérêt peut se répercuter sur sa vie quotidienne, se traduisant par des difficultés au travail ou par un éloignement de ses proches. Souvent, les patients et leur famille en souffrent énormément« , précise la spécialiste. Mais certains apathiques n’ont pas conscience de leur état avant que des proches les poussent à consulter. « Cela peut résulter d’une maladie mentale en train de se déclarer ou déjà installée« , ajoute-t-elle.
Quelles différences entre apathie et aboulie ?
Il faut distinguer l’apathie de l’aboulie, « qui est une diminution ou une absence d’envie, que l’on retrouve généralement dans la dépression« , explique notre interlocutrice. Mais dans l’aboulie, la personne est encore sensible à la motivation et aux récompenses à la clef d’une action, alors que la personne apathique ne ressent plus cette motivation. Quant à l’asthénie, il s’agit d’un affaiblissement de l’organisme, venant d’une fatigue physique et non morale comme dans l’apathie.
Quels sont les signes de l’apathie ?
L’apathie se traduit au quotidien par l’absence partielle ou totale de réponse à certains stimuli habituels. La personne ne prend plus d’initiatives, et se sent constamment démotivée. « Des activités quotidiennes comme pratiquer une passion, faire du sport, sortir, aller voir des amis ou faire des activités en famille ne l’attireront plus« , précise la psychothérapeute. La personne n’est plus passionnée par rien, ne ressent plus d’émotions ou de sensations. Cela peut aussi aller jusqu’à une perte d’intérêt vis-à-vis d’autrui.
Déprime ou flemme ?
Pour différencier l’apathie de la simple « flemme », il y a quelques indices : « Une personne flemmarde n’aura pas envie de faire certaines choses déplaisantes comme aller travailler, faire du ménage ou les courses, mais prendra plaisir à sortir, aller au cinéma, etc. Les personnes apathiques ne peuvent pas se mobiliser pour toutes choses en général« , insiste la professionnelle. Le vrai signal qu’il y a un problème est donc l’incapacité à mener sa vie normalement, qui engendre de la souffrance chez la personne, voire aussi dans l’entourage.
Pourquoi on a envie de rien ?
Un comportement apathique peut être provoqué par de nombreuses causes. Les premières sont les troubles psychologiques : « L’apathie peut faire partie d’un tableau clinique« , explique Dina Karoubi-Pecon. La bipolarité, la schizophrénie ou encore la dépression peuvent entraîner de l’apathie. La prise de drogues peut également empirer la situation. Ce trouble peut aussi être causé par l’hypothyroïdie (une insuffisance d’hormone thyroïdienne, dont le rôle est de contrôler le métabolisme). « Il peut également être la conséquence d’un traumatisme émotionnel, d’un état de grand stress, d’un événement traumatisant ou d’un moment de grande détresse, quand quelque chose bascule dans la vie« , décrit la professionnelle. L’apathie peut aussi être déclenchée par des lésions cérébrales provoquées par des maladies neuro-dégénératives (maladie d’Alzheimer, de Parkinson, de Huntington…) ou par d’autres affections touchant la sphère neurale, comme la démence, un AVC, etc.
Une personne apathique n’est pas une personne « flemmarde ».
Que faire quand on a envie de rien ?
« Lorsque l’état d’apathie se répercute sur le quotidien du patient et devient handicapant (incapacité à travailler, perte de lien social, voir incapacité à sortir), une prise en charge chez un psychologue ou psychanalyste est absolument nécessaire« , explique la spécialiste. « Quand cet état s’installe, il faut intervenir et consulter assez vite ». Notre interlocutrice conseille de bien se renseigner sur la spécialité du psychologue, ses diplômes et sa renommée avant de consulter. « Si l’apathie est couplée avec une dépression ou de l’anxiété très importante, ou si la thérapie simple n’arrive pas à mobiliser la personne, il peut être nécessaire d’aller voir un psychiatre [ndlr : qui a le titre de Docteur]. Celui-ci pourra prescrire des antidépresseurs ou tout autre traitement médicamenteux« , précise-t-elle. En plus d’une thérapie chez un psychologue ou un psychiatre, des groupes de paroles peuvent aider le patient à retrouver un lien social perdu. « Quant aux traitements, il ne faut pas faire d’automédication, insiste l’experte. C’est à un spécialiste d’évaluer la nécessité d’un traitement, son type, son dosage…«
Merci à Dina Karoubi-Pecon, psychanalyste et psychothérapeute, auteure de « Une saison chez le psy » Propos recueillis en 2019.
Source : JDF Santé