La maladie de Fanconi fait partie des pathologies pour lesquelles il n’existe pas de traitement curatif. La prise en charge dépend donc des symptômes observés. Entretien avec le Pr Régis Peffault de Latour, hématologue à l’hôpital Saint-Louis, spécialisé dans les maladies immuno-hématologiques rares et coordonnateur du centre de référence des aplasies médullaires.
C’est quoi la maladie de Fanconi ?
La maladie de Fanconi est une maladie génétique de la moelle osseuse relativement rare (300 à 400 cas en France) qui a été décrite pour la première fois en 1927 par un pédiatre suisse. C’est une forme d’aplasie médullaire qui se traduit par la disparition des cellules dans la moelle osseuse. On distingue deux types d’aplasies médullaires :
► Dans 80% des cas, l’aplasie médullaire est auto-immune, c’est-à-dire que le système immunitaire se met à détruire la moelle osseuse sans que l’on sache pourquoi.
► Dans 20% des cas, l’aplasie médullaire est due à une anomalie génétique constitutionnelle (transmis des parents à l’enfant). La maladie de Fanconi est la plus fréquente d’entre elles.
Quelle espérance de vie ?
« L’espérance de vie s’est considérablement améliorée ces dernières décennies car les greffes ont moins de toxicité qu’auparavant mais habituellement, la moitié des patients meurt avant l’âge de 40 ans« , indique le Pr Régis Peffault de Latour.
Quels sont les symptômes ?
La maladie de Fanconi se traduit par plusieurs types de symptômes, qui ne se manifestent pas systématiquement chez tous les individus. Les signes les plus fréquents sont :
► Des malformations congénitales : la petite taille, la microcéphalie, les anomalies des pouces et des radius font partie des signes physiques les plus souvent observés. Les malformations peuvent aussi affecter les reins (souvent les enfants atteints n’ont qu’un seul rein), les organes génitaux, les systèmes nerveux et digestif, ou le cœur.
► Une insuffisance de la moëlle osseuse. L’insuffisance de la moëlle apparaît plus tard, vers l’âge de 7 ou 8 ans, et peut concerner aussi bien les globules rouges (anémie), les globules blancs (neutropénie) que les plaquettes (thrombopénie). Elle évolue généralement vers une aplasie médullaire. Cette insuffisance se traduit par :
- une grande fatigue
- des essoufflements
- des infections répétées et des hématomes (du fait du faible nombre de plaquettes).
► Un risque élevé de cancers et de leucémie chez les patients atteints de la maladie de Fanconi. « Comme il s’agit d’une anomalie de réparation de l’ADN, les patients atteints peuvent développer des cancers, surtout épidermoïdes muqueux (cancer de la bouche, de l’œsophage) dont le pronostic n’est pas bon car les traitements du fait de l’anomalie de réparation de l’ADN sont plus toxiques que bénéfiques« , développe le spécialiste.
Quelle est la cause ?
« La maladie de Fanconi est due à une anomalie de réparation de l’ADN. Les enfants naissent avec une moelle osseuse moins riche que la normale et qui s’amenuise au fil du temps. Avant l’âge de 20 ans, ils développent une ou des cytopénie(s) qui se traduit par une diminution des cellules sanguines, notamment les plaquettes, les globules rouges et les globules blancs)« , informe le médecin hématologue.
Comment diagnostique-t-on cette anémie ?
Le diagnostic de la maladie de Fanconi est souvent tardif : il est rarement évoqué avant l’apparition de l’insuffisance de la moelle dite insuffisance médullaire. Il est réalisé grâce à un test de cassures chromosomiques, pratiqué en laboratoire. Un diagnostic prénatal est également possible pour les familles qui le demandent : par analyse moléculaire dans les familles où la maladie a déjà été étudiée.
La greffe de moëlle osseuse est le seul moyen de traiter l’insuffisance médullaire.
Comment soigner la maladie de Fanconi ?
La maladie de Fanconi fait partie des pathologies pour lesquelles il n’existe pas de traitement curatif. La prise en charge dépend donc des symptômes observés : intervention chirurgicale pour les malformations des pouces, suivis auditif, dermatologique, gastrologique, et/ou néphrologique prescrits en fonction des manifestations de la maladie. La greffe de moelle osseuse est le seul moyen de traiter l’insuffisance médullaire. Un suivi et des examens réguliers (hémogramme et myélogramme) sont également nécessaires pour prévenir les anomalies et les risques de leucémie. « Un traitement suspensif, c’est-à-dire qui permet d’améliorer les choses, peut être proposé quand la greffe est trop risquée : l’administration d’androgènes. Ce traitement permet de limiter la diminution des cellules sanguines. Mais les effets secondaires des androgènes ne sont pas négligeables : ils sont virilisants donc ils augmentent la pilosité et à plus long terme, peuvent être à l’origine de tumeurs du foie », précise notre expert.
Source : JDF Santé