Le cancer du sein est le cancer le plus fréquemment diagnostiqué chez la femme, mais aussi le plus mortel (12 146 décès chaque année en France). Environ 60 000 nouveaux cas de cancer du sein sont diagnostiqués chaque année en France. Pour autant, la mortalité est en baisse depuis les années 1990 alors que l’incidence est en augmentation souligne Santé Publique France. La survie des personnes atteintes d’un cancer du sein s’est améliorée. Le cancer du sein fait l’objet d’un programme national de dépistage organisé afin d’être détecté précocement et d’en réduire la mortalité. Le cancer du sein peut aussi toucher l’homme mais dans une très faible proportion (moins de 1 % de l’ensemble des cas).
Définition : qu’appelle-t-on un cancer du sein ?
Le cancer du sein est une pathologie qui se développe à partir des cellules de la glande mammaire : on parle d’adénocarcinome. « Une cellule de la glande mammaires se transforme et se développe soudainement de manière anarchique ; les cellules qui en résultent, prolifèrent sans s’arrêter et peuvent migrer dans d’autres parties du corps. Ce sont alors des métastases, qui peuvent atteindre les os, les organes comme le foie ou les poumons…« , explique le Pr Jean-Yves Pierga, chef du département d’Oncologie médicale de l’Institut Curie. Ces cellules se développent à partir de l’épithélium qui borde les canaux galactophores (dans lesquels circule le lait).
Quels sont les facteurs de risque d’avoir un cancer du sein ?
On distingue plusieurs facteurs de risque du cancer du sein. Les premiers sont fréquents, mais ont une faible contribution dans le développement du cancer du sein. Par exemple, constituent des facteurs de risque modérés :
- le fait d’avoir eu ses règles tôt,
- d’avoir une ménopause tardive,
- de ne pas avoir eu d’enfant ou plus tardivement,
- de ne pas avoir allaité
Autres facteurs de risque fréquents, mais relativement faibles en terme d’impact :
- le fait d’avoir suivi un traitement hormonal contre la ménopause,
- le surpoids,
- l’obésité,
- la sédentarité,
- la consommation d’alcool, voire de tabac (de plus en plus d’études incriminent ces deux facteurs)
On distingue un autre sous-groupe de facteurs de risque : « ceux qui sont moins fréquents, mais qui jouent un rôle important« . Il s’agit des facteurs génétiques. Les femmes porteuses des gènes BRCA1 ou BRCA 2 peuvent avoir jusqu’à 70 % de risque de développer un cancer du sein dans leur vie. « Mais cela représente moins de 5 % des cas parmi les patientes« . L’hérédité joue aussi un rôle : les femmes ayant eu des antécédents de cancer du sein dans leur famille sont plus exposées. D’autres gènes, BRCA1 ou BCRA2, plus rares peuvent aussi être impliqués. « Il existe enfin des facteurs très spécifiques, des facteurs ‘niche‘ », ajoute Jean-Yves Pierga. Ainsi, le fait d’avoir été irradié au thorax pendant l’adolescence après un premier cancer augmente le risque de développer un cancer du sein à l’âge adulte.
Quels sont les symptômes d’alerte d’un cancer du sein ?
Une masse dans le sein (boule au niveau du sein) est le symptôme le plus évident. « Mais actuellement, grâce aux progrès du dépistage, on détecte les cancers à un stade de plus en plus précoce, sur la mammographie, avant même qu’apparaisse cette masse« . De manière plus rare, on retrouve d’autres symptômes :
- déformation du sein,
- rétraction du mamelon,
- écoulement mammaire,
- changement de la couleur de la peau autour du mamelon,
- ganglions à l’aisselle.
Comment dépister un cancer du sein ?
Idéalement, le médecin généraliste, gynécologue ou sage-femme doit procéder à un examen des seins au moins une fois par an.
- La palpation des seins et des aisselles apporte des indications essentielles. En cas de potentielle anomalie, une mammographie ou une échographie peuvent être prescrites.
- La mammographie est l’examen radiographique des seins, qui permet le plus souvent de révéler les tumeurs même si elles ne sont pas détectables par la palpation des seins car trop petites.
- L’échographie explore le sein grâce à des ultrasons et permet, dans certains cas, de mieux préciser la nature d’une image révélée par la mammographie.
- L’imagerie, par résonance magnétique (IRM) est le troisième examen radiologique disponible pour l’étude de la glande mammaire. Il est réservé à des situations précises comme la surveillance des femmes à risque génétique prouvé.
- Si nécessaire, une biopsie permet de prélever des échantillons de la lésion, sera demandée. L’examen au microscope est indispensable pour savoir si la tumeur est bénigne ou si la tumeur est un cancer.
Heureusement, sur 5 grosseurs examinées, 4 sont bénignes.
Le cancer du sein fait l’objet d’un dépistage organisé par les autorités sanitaires. Toutes les femmes de 50 à 75 ans sont invitées à réaliser une mammographie tous les deux ans. « Cette mammographie fait l’objet d’une double relecture radiologique, afin d’éviter de passer à côté des cas« , précise Jean-Yves Pierga. Ce dépistage est intégralement pris en charge par la Sécurité sociale. Les femmes ayant un risque élevé de cancer du sein peuvent bénéficier d’un suivi spécifique adapté à leur situation individuelle. La commissaire européenne à la santé, Stella Kyriakides, a préconisé le 20 septembre 2022 d’abaisser à 45 ans le début du dépistage du cancer du sein, contre 50 ans actuellement. « Les recommandations indiquent que l’on doit orienter les patientes à risque dès l’âge de 25 ans vers une personnalisation du dépistage« . Les consultations gynécologiques sont aussi l’occasion de se dépister, grâce à la palpation mammaire. Les femmes peuvent également pratiquer l’autopalpation afin de détecter une éventuelle masse.
Comment s’auto-palper les seins ? L’autopalpation est un geste qu’il est conseillé d’effectuer tous les mois après les règles, afin de repérer une éventuelle grosseur du sein. Mettez-vous d’abord debout devant un miroir, inspectez les deux seins et vérifiez l’absence d’écoulement d’un mamelon, de crevasses, de plis anormaux ou d’une peau qui pèle. Puis, levez un des deux bras, puis avec les 3 doigts de l’autre main, palpez le sein du côté du bras levé : débutez par la partie externe, les doigts à plat, en effectuant de petits cercles. Il faut rechercher toute sensation de boule, de fossette sur la peau, ou de grosseur. Palpez également le mamelon et la zone entre le sein et l’aisselle, pressez le mamelon et vérifiez qu’aucun écoulement ne se produise. |
Quels sont les 4 stades d’un cancer du sein ?
On distingue 4 stades de cancer du sein :
- Le premier stade (I) correspond à une petite tumeur de taille inférieure à 2 centimètres, sans atteinte ganglionnaire.
- Le second stade (II) correspond à une tumeur dont la taille est comprise entre 2 et 5 centimètres ou l’atteinte d’un à trois ganglions axillaires.
- Le troisième stade (III) correspond à un stade localement avancé, avec une tumeur de taille supérieure à 5 centimètres ou atteignant le peau plus de quatre ganglions.
- Le quatrième stade (IV) correspond au stade métastatique. Les cellules cancéreuses se sont propagées dans d’autres organes, tissus ou os, et ont formé des métastases.
« Attention, il y a souvent une confusion entre le stade et le grade« , précise le Pr Pierga. En effet, le stade indique l’extension de la maladie, la taille des tumeurs, tandis que le grade désigne l’agressivité de la tumeur. On distingue trois grades : le premier correspond aux tumeurs les moins proliférantes et le troisième, aux tumeurs les plus agressives. « Ainsi, on peut avoir une toute petite tumeur mais très agressive« , ajoute-il.
Quels sont les traitements pour soigner un cancer du sein ?
Plusieurs types de traitements peuvent être utilisés (seul ou en association) pour traiter un cancer du sein. Selon les cas, ils ont pour but de supprimer la tumeur ou les métastases, réduire le risque de récidive, ralentir le développement de la tumeur ou des métastases et améliorer la qualité de vie de la patiente, en atténuant les symptômes liés à la maladie :
- la chirurgie (ablation du sein)
- la radiothérapie,
- l’hormonothérapie,
- la chimiothérapie,
- les thérapies ciblées.
Le choix du ou des traitements dépend de plusieurs paramètres :
- Du type de cancer et de l’endroit où il est situé dans le sein
- De son caractère unifocal (un foyer cancéreux) ou multifocal (plusieurs foyers cancéreux) ;
- De son stade au moment du diagnostic ;
- De son grade ;
- Du statut des récepteurs hormonaux ou de HER2;
- Des éventuelles contre-indications aux traitements ;
- De l’état de santé général, de l’âge, des antécédents personnels médicaux et chirurgicaux et des antécédents familiaux;
- Des préférences du patient
Pour contrer les possibles effets secondaires (chute des cheveux, dans certains cas de chimiothérapie, fatigue, nausées, vomissements…), des « soins de support » sont aujourd’hui associés aux traitements spécifiques du cancer.
Quand faire une ablation du sein ?
Le premier traitement proposé aux femmes atteintes de cancer du sein est la chirurgie. La tumeur ainsi que le ou les ganglions axillaires sont retirés. « On fait de moins en moins de curage axillaire ; on retire le ganglion sentinelle, dans lequel se draine la tumeur« . L’ablation du sein (mastectomie) n’est pas systématique : cet acte dépend de la taille de la tumeur. « La tendance actuelle est plutôt aux interventions sur petites tumeurs, on pratique moins de mastectomies« , précise le Pr Pierga. Si une mastectomie a dû être pratiquée, la chirurgie de reconstruction s’est maintenant beaucoup développée.
Quand avoir recours à la radiothérapie ?
Autre traitement local-régional : la radiothérapie ou « rayons », qui vient en complément de la chirurgie. Cet acte a systématiquement lieu lorsque le sein est conservé, afin de traiter le reste du sein, mais peut aussi survenir à la suite d’une ablation. Ce traitement dure en moyenne 5 à 6 semaines et après la résection chirurgicale de la tumeur du sein. Il se pratique généralement sans hospitalisation.
Quand avoir recours à l’hormonothérapie ?
Sur le plan général, des traitements adjuvants sont administrés afin d’éviter une récidive et la prolifération de cellules cancéreuses métastatiques. Un traitement anti-hormonal est prescrit sous la forme de comprimés. « Il s’agit de bloquer la production d’œstrogènes, sachant que les deux-tiers des cancers du sein sont hormono-dépendants« .
Quand avoir recours à la chimiothérapie ?
Une chimiothérapie peut être nécessaire en cas de tumeur plus agressive, d’absence de récepteurs aux hormones sur la tumeur ou d’atteinte des ganglions . Les effets secondaires de la chimiothérapie sont lourds : perte de cheveux, baisse de l’immunité, fatigue importante, ménopause précoce… Il faut compter environ 6 à 8 séances espacées de trois semaines. Par ailleurs, des chimiothérapies pré-opératoires peuvent être administrées afin de réduire la taille de la tumeur pour éviter l’ablation du sein, ou pour les tumeurs les plus agressives.
Quand avoir recours aux thérapies ciblées ?
Enfin, les thérapies ciblées peuvent être prescrites, en complément de la chimiothérapie, mais elles ne s’adressent qu’aux femmes atteintes de certains cancers du sein (le HER2, qui représente 12 à 15 % des cas). Les traitements personnalisés, quant à eux, constituent un espoir de la médecine moderne. « Mais dans le cancer du sein, ces traitements en plein développement sont pour le moment surtout utilisés dans des formes avancées de la maladie. L’immunothérapie n’est pas encore très développée dans le cancer du sein ».
Comment se passe l’après cancer du sein (reconstruction mammaire, suivi…) ?
La chirurgie plastique et reconstructrice, de plus en plus souvent conseillée après l’ablation d’une tumeur, permet d’offrir aux patientes une aide considérable en retrouvant une poitrine proche de celle qu’elles avaient avant l’intervention. De plus en plus de services de cancérologie intègrent dans leur équipe un chirurgien plasticien afin de conseiller aux patientes une reconstruction mammaire dans les meilleures conditions. Le cancérologue et le chirurgien plasticien collaborent ensembles à cette étape importante pour la femme. Le chirurgien conseillera la patiente en fonction du type d’intervention effectuée, du traitement post-opératoire, de l’état de la peau et des muscles…
Guérison : quel est le pronostic de survie du cancer du sein ?
Le cancer du sein est un cancer de bon pronostic. C’est en tout cas l’un dont la mortalité est la moins élevée, du fait d’un diagnostic précoce. La survie nette standardisée est de 97 % à 1 an et de 88 % à 5 ans, selon les chiffres publiés par Santé Publique France.
- Les survies nettes à 5 ans sont les plus élevées pour les femmes de 50 et 60 ans (94 %) et légèrement inférieures pour les femmes de 40 et 70 ans (92 %).
- Les taux de mortalité en excès chez les femmes de 80 ans sont supérieurs à ceux des autres âges, quel que soit le temps écoulé depuis le diagnostic, avec un écart maximal immédiatement après le diagnostic. Ce phénomène traduit probablement la découverte plus fréquente du cancer à un stade métastatique chez les femmes plus âgées, et l’existence de comorbidités qui peuvent empêcher des traitements curatifs ou induire des complications post-thérapeutiques, explique Santé Publique France.
- En dehors de la phase initiale de traitement, le taux de mortalité en excès atteint un maximum entre 2 et 3 ans après le diagnostic, période à laquelle se produisent classiquement les rechutes précoces
- « Certains cancers du sein très agressifs gardent un mauvais pronostic. Et les cancers au stade 4 restent incurables, sauf dans des cas rares. Il reste encore bien des progrès à faire » informe notre interlocuteur.
Source : Survie des personnes atteintes de cancer en France métropolitaine 1989-2018 – Sein. 17 novembre 2020. Santé Publique France.
Merci au Professeur Jean-Yves Pierga, chef du département d’Oncologie médicale de l’Institut Curie.
Source : JDF Santé